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D'UN CHARLATAN LYONNAIS 93 Quant à la succession de Dominique Franki, les saisies opérées après son décès font présumer qu'il ne laissait comme actif net, que le dossier déposé aux archives de la Charité, et les documents qui le composent, témoignages de la fortune éphémère de l'inventeur du baume otto- man, opérateur ordinaire et privilégié de Sa Majesté le roi Louis XV. Ce même hôpital de la Charité qui recueillit, il y a 150 ans, l'enfant et les papiers du charlatan italien, fut le dernier asile, dans notre siècle, d'un autre forain bien Lyonnais celui-là et que connut la génération de la première moitié du siècle, le père Thomas. Dans sa jeunesse, auteur et acteur au théâtre de Tivoli aux Brotteaux, le père Thomas devenu vieux fut réduit à transporter la scène de ses exhibitions sur la place publique, où, chanteur, musicien et charlatan, il acquit sinon la fortune au moins une popularité, que ne connurent jamais beaucoup de ceux qu'un catalogue a classés parmi les Lyonnais dignes de mémoire. Léon Boitel, en 1833, a buriné cette figure originale : « Allez à Bellecour à midi, dit cet auteur, vous le trouverez le chapeau sur l'oreille, la grimace à la bouche, le nez au vent; soldats du poste voisin, gamins, femmes de chambre et tous les oisifs du quartier à ses côtés, foule bizarre rangée, groupée autour de lui. Il la tient, cette foule, il la captive par ses lazzis, il en dispose à son gré, il lui vend de l'orviétan pour les dents et les cors aux pieds, de la pommade pour les cheveux et les moustaches, il lève les taches et les agrandit, il chante et joue du violon sur une seule corde comme Paganini, ni plus ni moins; il parle, il grimace, il