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                    DE « PAUCA PAUCIS »                    485

 la concession qu'il octroie en morale à la raison humaine
 d'une autorité qu'il lui refuse peut-être en métaphysique.
 Mais l'essentiel, après tout, est que notre poète croie à la
liberté, à la loi impérative du devoir, à la nécessité d'une
harmonie entre le bonheur et la vertu, car il se trouve ainsi
 conduit à rétablir comme indubitables les vérités qui sont
 impliquées dans celles-là, l'existence de Dieu et l'immorta-
 lité de l'âme. Je ne saurais trop l'en louer.
    Par ses hautes préoccupations intellectuelles, M. Tisseur
se rapproche de Laprade, mais il est plus serré, plus concis,
et totalement dépourvu de ces élans spiritualistes, chers à
l'auteur de Pernette et des exquises Symphonies. En dernière
analyse, ce qu'il y a surtout chez M. Tisseur, c'est une
originalité merveilleuse. S'il se rapproche de Leconte de
Lisle c'est seulement par la contexture de son vers. La
caractéristique de son talent est de ne devoir rien à per-
sonne et de s'appartenir en propre, chose rare.
    Sans doute il se rattache à l'école Lugdunienne par plus
d'un point commun, la finesse et le charme d'un Soulary,
la grandeur d'esquisse d'un Chenavard qu'on retrouve
parfois dans les tableaux antiques épars, ça et là, au long de
ses poèmes, et cet amour de l'Hellas, commun à bien des
poètes lyonnais, cet amour de l'Hellas dont les colonies,
remontant jadis (prétend la légende) la vallée du Rhône,
vinrent s'établir à Lyon au premier et au deuxième siècle
de notre ère. Mais s'il appartient à sa patrie d'origine par le
culte qu'il a voué au beau, il me paraît s'en éloigner singu-
lièrement en raison de son absence complète de mysticisme.
Ce n'est pas qu'il ne pose point çà et là, des interrogations
comme nous faisons tous. Mais c'est l'Inconnaissable et
non l'Infini qui me paraît le tourmenter. Je le trouve moins
épris de symboles que les poètes lyonnais ses prédécesseurs.