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THÉOPHILE GAUTIER I33 noyant dans des détails à la Zola ? Une pareille supposition fait sourire, bien que Gautier n'ait parfois point reculé devant les détails un peu vifs. Son roman des Jeune France en est la preuve; ses amis l'avaient surnommé à cause de son indolence et avec quelque raison : « L'Hindou et le Turc » (1). <•< La plupart de ses nouvelles, dit M. Richet, nous représentent la cristallisation de ses propres songes. » Qu'on juge après cela combien la réalité de la vie fut dure et blessante pour cet Attique affamé d'idéalisme et de beauté, que le Parthénon attendrit aux larmes, lors de son passage à Athènes. En en revenant il écrit à Louis de Cormenin, qu'auprès d'Athènes « Venise lui a paru triviale et grotes- quement décadente. » Je recommande à ce propos, si l'on veut avoir des ren- seignements plus complets sur l'état d'âme de Théo en présence des chefs-d'œuvre, de lire dans les Souvenirs litté- raires de Maxime du Camp, tout ce qui se rapporte au séjour que ce dernier fit à Venise en compagnie de Flaubert et de Gautier. Mais comme poète il fut incomparable. Rien n'est plus charmant que ses vers souples, aisés et d'une si délicate élégance rythmique. Sa verve poétique s'épura d'ailleurs, se simplifia de plus en plus. Ses premiers poèmes con- tiennent pourtant,indépendamment d'une inspiration jamais (1) Un jeune critique de talent, M. René Doumic, disait l'autre jour de Théophile Gautier « que l'Orient eût été la vraie patrie de ce rêveur indolent, épris des couleurs et des for.nes et qui n'eut toute sa vie qu'une idée, s'il en eût une, celle du néant. » Cf. Revue des Deux Mondes, du 15 août 1893. Jugement bien sévère que celui-ci. Et puis la critique est aisée...