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298 PROMENADE AU SALON chicane pour les pieds de la jeune fille : s'ils remplissent vraiment les énormes sabots qu'il lui donne, je plains la personne affligée de pareilles extrémités, et il eût été cha- ritable d'atténuer ce vice de conformation. Un artiste parisien, M. Yperman, a envoyé une Sainte Cécile (871), à laquelle on s'est décidé à accorder les honneurs de la cimaise. Ce thème d'une martyre, conser- vant dans la mort la sereine beauté de son visage et un reflet des célestes visions qui ont réjoui sa dernière heure, a été souvent abordé. Bien peu, des modernes surtout, l'ont fait avec autant de bonheur. Beaucoup de simplicité, pas d'effet cherché ; nul archaïsme, une grande harmonie de couleur, une draperie dont tous les plis et toutes les retombées s'expliquent. Aimez-vous les Vérités ! Le Salon en est plein. Elles sont nues, comme il faut s'y attendre, et plusieurs fort laides, ce qui n'est pas une compensation. Celle de M. Magaud (543), superbement construite, a l'air bête, afin de nous rappeler, je pense, que la bêtise est quelquefois une des formes de la vérité. Celle que M. de la Brély (137) nous présente, au sortir de son puits, modelée dans une pâte fraîche et transparente, est plus fine et plus engageante, mais je m'en méfierais. Pendant que nous en sommes aux sujets court-vêtus, citons la jolie allégorie de Mai (320), dont M. Collin nous fait entrevoir les formes exquises. C'est moins une figure qu'une vision, se détachant dans une atmosphère idéale ; c'est de la chair intangible et revêtue, pour ainsi dire, de rayons. On peut en dire autant de la charmante fantaisie que M. Payen intitule le Printemps (660). Cette blonde figure, enveloppée d'une gaze vaporeuse, fait penser aux héroïnes d'Ossian flottant au milieu d'une nuée transparente.