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LAMARTINE 389 affirmait hautement, dans la préface de Jocelyn, que «l'on ne doit donner à ces œuvres de complaisance de l'imagination que les heures laissées libres par les devoirs de la famille, de la patrie et du temps ! » En 1838, dans Y Avertissement placé en tête de la Chute d'un Ange, il raillait, (c'est à n'y pas croire), « ces natures contemplatives à qui Dieu n'a donné que des ailes, et qui peuvent planer toujours dans des régions éthérées, portées sur leurs rêves immortels. » Enfin, dans la lettre-préface des Recueillements poétiques, il était ouvertement honteux de l'opinion qu'il avait pu donner de lui : « Que penseriez-vous, s'écriait-il, d'un homme qui chanterait du matin jusqu'au soir ? La poésie n'a jamais été qu'un douzième tout au plus de ma vie réelle. » Et nous avons le spectacle d'un poète, d'un grand poète, qui répudie sa muse et renie les beaux vers. C'était un crime ; pour son châtiment, Lamartine fut livré à la politique, à cette chose funeste dont ce madré de Socrate disait que son démon l'en avait toujours détourné. Celui de Lamartine l'y poussait au contraire, et même depuis longtemps. Lors de sa réception à l'Académie française, au printemps de 1830, Cuvier, qui le recevait, croyait avoir à le prémunir déjà contre cette tentation, et lui donnait sur ce point un bon conseil qui avait bien des chances de n'être pas suivi, puisqu'il avait dû être donné. La Révolution de juillet survint, et dégagea malheureuse- ment le poète de la diplomatie, qui lui fournissait un rang sans l'occuper. Ce fut en vain que les électeurs lui furent peu cléments une première fois. Au cours de son voyage en Orient, lady Stanhope, tirant son horoscope d'après la forme de son pied : (il l'avait cambré, paraît-il,) ne l'avait- elle pas assuré qu'il était un poète, mais qu'il serait un K° 4. — Novembre 1890. 2S