page suivante »
378 LAMARTINE geur, c'est-à -dire de quelqu'un qui croit aux pays qu'il visite, Lamartine livrait son carnet tel quel, immédiate- tement, avec une confiance superbe, sans l'avoir allégé d'une feuille (2), et il y en avait infiniment, et ce n'étaient pas de vraies notes de voyage, car le voyageur ne croyait qu'à lui-même. Sans la même excuse que le doge de Gênes et dans un tout autre sens que lui, mais comme lui, de toutes les splendeurs que l'Orient lui avaient offertes, sa personne était incontestablement celle qui l'avait le plus émerveillé. Dieu sait pourtant s'il y en avait vu, des splendeurs ! A vrai dire, il n'y avait pas vu autre chose. Reçu partout comme un souverain dont il menait le train et dont il avait le faste, ses aventures tiennent à peine de l'humanité. Sur ses pas, tout devient resplendissant, chatoyant, étincelant : nature, hommes, animaux, scènes. Pas un site qui ne soit pittoresque, merveilleux, fabuleusement oriental ; pas une femme qui ne présente, avec la pointe d'exotisme qui convient, la grâce, la jeunesse et la beauté réunies ; pas un homme qui n'incarne la dignité, la loyauté, la noblesse, et le reste. « Toutes leurs pensées se peignent dans leurs yeux et dans les mouvements convulsifs de leurs joues » : si l'auteur parle ainsi des chevaux du pays, que sera-ce des hommes ? Les Turcs lui ont offert en effet le spectacle de toutes les vertus, et il l'expose avec méthode : i° physique- (2) Il n'en retrancha même pas trois ou quatre descriptions dont il avait complété l'année précédente une dissertation sur les Destinées de la poésie, qu'il avait donnée pour préface à une édition d'ensemble de toutes ses œuvres (1834). Cette dissertation n'apprenait pas grand'- chbse aux lecteurs, sinon que Lamartine avait voulu faire, lui aussi, sa Préface de Cromwell.