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322 LAMARTINE âme bien née, qui s'était pliée consciencieusement à une heureuse formation. Lamartine n'allait pas être de ceux qui ont à lutter contre la destinée pour se faire une place au soleil. Presque au sortir des études, après un court séjour à Lyon, et un long voyage en Italie, où il employa les années 1810 et 1811 à relire Corinne et à rêver, il revint à Paris et commença de faire des vers. Il dut s'interrompre pour raison de santé, et retourner en Italie en 1813 ; cette fois, ce furent les évé- nements de 1814 qui l'en ramenèrent. Royaliste de famille et jusque-là de sentiment, il s'enrôla dans les gardes du corps. Mais il ne reprit pas, après les Cent-jours, lé service qu'ils avaient interrompu. Il était déjà tout à la poésie et aussi à la jeunesse : ce sont les années d'Elvire, qui, bien que Lamartine en ait fait une image toute vapo- reuse et idéale, a, paraît-il, bien réellement existé. Le lac, le lac authentique, n'est autre que celui du Bourget. Mais Elvire mourut, et Lamartine en pensa mourir. Il passa alors à Paris deux années, de 1817 à 1819, dans l'isolement et dans le chagrin. Son génie s'y trempait. Quand il se fit entendre, ce fut de son âme même, de cette âme alors blessée, que sortirent vraiment ses vers. Les Méditations poétiques ne sont qu'un gémissement, mais un gémissement merveilleux, d'une délicieuse éloquence. Il y aura beaucoup à dire de ce recueil, qui est demeuré pour plus d'un bon juge le chef-d'œuvre de Lamartine. Mais je voudrais d'un coup montrer quelle poésie venait de naître. Il me faudrait pour cela qu'un bon représentant de l'ancien mode eût traité dans le même temps quelqu'un des sujets des Méditations. ChênedoUé justement Ta fait. Ses Eludes poétiques, publiées, comme les Méditations, en 1820, con- tiennent une pièce, Le Clair de lune de mai, où il traite,