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LAMARTINE 3 21 ce petit discours que, suivant Lamartine du moins, l'édi- teur Didot accueillait ou plutôt refusait, en 1819, le manuscrit des Méditations poétiques. J'ai à peine besoin d'ajouter que tout cela est trop joliment arrangé pour être rigoureusement exact. Il faut se méfier des illusions de mémoire des grands hommes. Ici, le luxe des détails et leur précision, la complaisance que met le libraire à énu- mérer les qualités de Lamartine pour les lui reprocher, son insistance par trop niaise sur le plus précieux de ces prétendus défauts, l'originalité, doivent particulièrement nous mettre en garde. Il est certain pourtant que les Médi- tations poétiques ne furent pas éditées par Didot (2), et qu'elles étaient autre chose que les poésies de Michaud et de Luce de Lancival. Ce qui n'est pas moins certain, c'est leur foudroyant succès. C'était en 1820 ; Lamartine allait avoir trente ans. Né à Mâcon en 1790, il avait passé son enfance avec ses parents et au milieu de ses sœurs, dans la terre retirée de Milly, où la Révolution avait relégué la famille. Après avoir vaga- bondé quelques années dans les prairies et le long des ruisseaux, il entra au collège de Belley, où il ne fut, paraît- il, qu'un élève assez ordinaire. Pourtant, quand il partit, en 1809, il laissait pour adieux à ses maîtres une pièce de vers qui a pu figurer sans trop de disparate dans le recueil de ses œuvres. Les vers étaient d'un excellent rhétoricien; les sentiments, honnêtes, réglés et droits, annonçaient une (2) Didot se contenta de les imprimer. Elles n'eurent pas d'éditeur. Elles parurent à Paris, au dépôt de la Librairie grecque-latine-allemande, rue de Seine, n° 12, MDCCCXX, avec cette épigraphe bizarre : Ab Jove principium.