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368 L'ŒUVRE DE PIERRE DUPONT la poule au pot, jusqu'à Lassalle, réclamant la main mise de l'État sur tous les instruments de production, il y a bien des degrés. N'en déplaise aux censeurs de Pierre Dupont, les opinions émises dans ses chansons se rapprochent da- vantage du rêve humanitaire du Béarnais que des brutales théories du Teuton. Quant à ses préférences, elles sont nettement pour le régime républicain, et il resta fidèle au drapeau de son choix : ce qui n'est pas un mince mérite en un siècle où tant de poètes, en usant avec les bannières comme avec leurs maîtresses, ont sans scrupule promené leurs chants d'une couleur à l'autre. Il était de cette génération de 1848, enthousiaste, croyante et désintéressée, dont on a pu dire qu'elle personnifie, dans le cycle républicain, l'ère chevaleresque, comme la première République serait l'âge des Titans, comme la troisième, aurait, assure-t-on, inauguré la période des utilitaires. La République vient de Dieu, affirme hautement le poète dans une chanson datée du 25 février 1848. Cette déclaration est bien conforme au sentiment d'un temps où le peuple invitait le clergé à bénir les arbres de liberté, de même qu'elle s'accorde avec tout ce que nous savons de l'auteur. Mais lorsqu'il termine en disant du nouveau régime : C'est le ciel même en cette vie, En attendant l'éternité, nous ne pouvons nous défendre d'un sourire pour tant de foi juvénile, bien que nous soyons tentés de répondre : Ainsi soit-il !