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           UN LIVRE POSTHUME DE J.-J. AMPERE              141

devant elle les trésors de l'esprit le plus ingénieux. Bientôt
ses visites devinrent un besoin pour l'un et pour l'autre ;
car le vieillard sexagénaire et seul dans le monde s'attachait
de plus en plus à cette charmante créature, dont la rési-
gnation et la piété lui ouvraient des horizons jusqu'alors
inconnus. En effet, Mme L. était très pieuse ; elle souffrait
de voir Jean-Jacques si peu croyant ; elle le prêchait dou-
cement ; et, plus que ses paroles, !a sérénité avec laquelle
elle se préparait à la mort était pour le brillant sceptique
la plus efficace prédication.
   Il avait à revenir d'assez loin. On n'a pas été impunément
l'ami de Mérimée et de Stendhal. Beaucoup plus correct
que ses deux amis, car sa folle passion pour Mme Récamier
avait eu du moins cet heureux effet de le prémunir contre
les écarts de conduite, il partageait avec eux toutes les
illusions, tous les préjugés de la jeunesse libérale de 1830.
La piété du vieil Ampère, piété un peu intermittente,
n'avait pu avoir une grande influence sur un fils devant
lequel il était en admiration. Jean-Jacques n'était pas
impie, mais plein de préventions contre l'Eglise; et ses
longs séjours à Rome, loin de dissiper ces impressions
fâcheuses, n'avaient fait que les rendre plus vives et plus
tenaces.
   Il n'y a rien là qui doive surprendre. A Rome, de deux
choses l'une; on est séduit et conquis par la foi, ou bien
on s'étonne, on se raidit, on se révolte. C'est comme un
de ces tableaux qui, selon le point de vue où l'on se place,
présentent deux images absolument différentes. Malheureu-
sement, Jean-Jacques s'était placé du mauvais côté. Ce
livre même de Christian nous en offre bien des indices.
Beaucoup de menues pratiques de la piété romaine choquent
et rebutent le froid homme du Nord. Puis il rencontre sur