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DÉRIVÉS DU RHÔNE 133 s'oppose pas à ce travail. Il faudrait mettre en balance, et peser de part et d'autre l'excellence agricole et financière des canaux et l'intérêt de la navigation. Il faudrait recher- cher lequel, du dieu de la navigation, ou du dieu de l'irri- gation, assurera au pays plus de prospérités, et a droit à plus de sacrifices. Mais la question ne se pose pas ainsi : le dieu des canaux dérivés est un faux dieu, il n'est digne d'aucun culte. Je crois l'avoir établi en examinant devant vous le mérite intrinsèque de l'entreprise. Financièrement, elle est détestable : elle ne rendra pas ce qu'elle aura coûté. Et si on parle de sacrifices pécuniaires à accepter, nous répondrons que rien ne les justifie. Lors même que tout le périmètre arrosable profiterait des eaux des canaux, la plus- value serait insuffisante à satisfaire au capital d'exécution directe et d'aménagement privé. Mais combien sur ces 35,000 hectares profiteront des canaux? La submersion des vignes est un remède d'une application restreinte et peut- être d'une efficacité douteuse ; l'irrigation demande des dépenses d'aménagement considérables, et se heurte à mille obstacles qui en entravent le développement. Enfin le terri- toire qu'on se propose d'arroser, a, sur une grande partie, de l'eau en abondance, ou peut en trouver à sa porte. Dans de telles conditions, l'exécution des canaux dérivés serait une insigne folie. Mais, dira-t-on (et c'est par là que je termine), comment se fait-il, si la folie est si évidente, que le projet ait trouvé tant de défenseurs ? L'explication est simple.