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168 LES SALONS D'AUTREFOIS
ceux qui avaient la bonne habitude de porter toujours leur
crayon, et savaient un peu s'en servir.
Les poètes d'occasion faisaient des bouts-rimés, dont le
succès était ordinairement en sens inverse de leur mérite
littéraire.
On y projetait des parties de plaisir et l'on parlait de
celles déjà faites.
Car alors, il n'était pas extraordinaire de réunir vingt-
cinq personnes en pique-nique ou autrement, pour un
dîner champêtre, où l'on se rendait, soit en voiture, soit
en bateau, et même quelquefois à cheval, amazones et
cavaliers.
En jouant aux fagots, les dames ne craignaient pas de
chiffonner leurs robes, parce qu'elles ne coûtaient pas la
rançon d'un prince, et, sans jeter leurs chapeaux par-dessus
les moulins, elles les ramassaient gaîment. quand ils tom-
baient, parce qu'ils ne venaient pas de chez la première
faiseuse.
Il y avait partout une société qui savait s'amuser, se
croyant sûre du lendemain.
Le monde où l'on s'ennuie n'était pas encore à la hau- .
teur d'une institution.
Dans mes souvenirs de Nîmes, je trouve des réunions de
jour assez originales :
Un peintre distingué, Collin, directeur du musée de la
Maison Carrée, apportait son chevalet pour continuer son
tableau commencé, pendant qu'un poète devenu célèbre,
Reboul, lisait ses vers à ses intimes, avant de les livrer au
public.