page suivante »
464 LES HISTOIRES DE PU1TSPELU chargés de glaces ; de petites marchandes de fleurs harce- laient les chalands; un petit violoniste raclait tour à tour avec rage : Quand fat quitté ma Normandie et Ave Maria, car voici l'heure sainte; un pauvre diable chargé d'immenses thermomètres, que j'ai vu courir, durant trente ans, les cafés de Lyon, sans vendre un seul de ses instruments, offrait sa marchandise, selon sa coutume, silencieuse- ment. Aux tables, on causait des dernières nouvelles : de Mme Wable, la jeune première des Célestins; du maire, M. Terme; de l'adjoint, M. Victor Arnaud; du député, M. Fulchiron ou de M. Sauzet, président de la Chambre des députés; des trottoirs en bitume, qui avaient été la gloire de la mairie de M. Christophe Martin, et du projet en discussion au Conseil municipal pour approvisionner la ville avec les eaux de Royes, qui alimenteraient bien au- jourd'hui un ménage de cinq personnes. « Des messieurs en redingote noire, à manches un peu gonflées en pantalons blancs collants; des dames en robe de soie, en châles, en chapeaux, dits calèches, à fleurs, et en souliers découverts reliés à la jambe, par des rubans croi- sés sur un bas bien tiré (cela s'appelait des souliers à escla- vage); des jeunes filles, bras nus, en robes d'organdi, bien fraîches; des officiers de cavalerie, la taille étranglée, ne sachant où fourrer leurs jambes dans lesquelles s'empê- traient leurs grands sabres, et dans la salle, la dame du comptoir encadrée par des vases de fleurs et une immense glace dans le dos. — Voilà le tableau complet. » Tableau qui, par l'exactitude des détails et la grâce de la composition, mériterait d'être signé Boilly. Il est une remarque que l'on fera en lisant les Histoires de Puitspelu, c'est que la plupart de ses amoureux sont des