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                 LES HISTOIRES   DE   PUITSPELU          46S
 amoureux transis ou, pour parler plus noblement, les amou-
reux du sonnet d'Arvers.
   Irénée, Etienne, le valseur de la rue de la Gerbe, autant
de jeunes gens timides, indécis, scrupuleux, n'osant « dé-
clarer leur flamme, » adorant, en secret et en silence, des
divinités dont quelques-unes n'eussent pas été absolument
cruelles, pour peu qu'on les eût pressées.
   L'une d'elles entre autres, l'italienne Annunziata, femme
mariée, d'ailleurs, se montre assez disposée à déniaiser
Irénée-Daphné. On les voit, au cours d'un voyage au Pont-
Saint-Esprit, réfugiés tous deux dans une chambre d'hôtel
et s'abandonnant à des intimités périlleuses. Annunziata
est lasse et glacée. Irénée la prend dans ses bras, la porte
sur son lit, la déchausse, serre contre sa poitrine nue ses
deux pieds « d'un blanc d'azur » et les réchauffe de son
souffle
   — Ah! s'écrie Annunziata, je voudrais être ainsi cachée
tout entière dans ton cœur!
   La scène est charmante, mais elle s'arrête là. « Ce jeune
homme, qui portait l'Etna dans ses flancs, ne se permit
rien. »
   Il est retenu par le respect que lui inspire une femme
pure, une épouse, une mère de famille
   Dans l'histoire d'Etienne et de Mariette, une Mariette
dont les grands yeux noirs et les petites mains blanches
« gantant 6 deux fois court » se livrent à de nombreuses
escapades, l'amoureux Etienne assiste à toutes les fantaisies
de sa volage amie avec un stoïcisme rare. Vingt fois il veut
la quitter, se reprochant sa lâcheté, mais toujours il se sent
ramené vers l'infidèle, l'adorant de loin, la protégeant,
l'entourant de soins délicats et discrets, sans même pré-
tendre aux miettes du festin, dont tant d'autres se gor-
        N° 6. — Juin 1886,                          30