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306 LES CONCERTS que l'empressement du public à répondre au premier appel du Comité. En quelques jours, toutes les places numérotées du Grand-Théâtre étaient louées et les retardataires se dis- putaient les derniers strapontins. Le succès matériel était assuré, la location couvrait tous les frais prévus, on pouvait donc songer au côté purement artistique. La Société eût manqué à son but, si elle ne s'était em- pressée de rompre entièrement avec la détestable tradition, qui veut qu'on aille au concert moins pour entendre de la musique que pour y applaudir des artistes plus ou moins sympathiques. Nos murs sont en ce moment couverts d'affiches multi- colores annonçant pompeusement les concerts traditionnels des cent ec quelques Sociétés musicales, fanfares ou cho- rales que notre ville a le bonheur de posséder. Voyez un seul de ces programmes, vous les connaîtrez tous. La fan- fare jouera son morceau, toujours le même, quoique le titre puisse varier, suivi du défilé de nos artistes lyriques, obligés d'acheter ainsi la bienveillance de ce petit monde musical. Ils viennent, mal disposés, diminués du prestige du costume et de la scène, servir une tranche d'opéra quel- conque. C'est là tout l'idéal artistique de la masse populaire, en prenant même la plupart de ceux qui ont quelques notions de musique; c'est de là encore que provient cette détes- table éducation artistique des habitués du parterre, qui ne s'attachent qu'à certains tours de force des chanteurs et restent insensibles devanr une phrase dite avec art, aussi bien que devant le prélude d'orchestre le plus délicatement interprété. Il appartient donc à la Société des concerts de régénérer