page suivante »
426 LE THÉÂTRE A LYON une anecdote, rapportée par l'un de ses admirateurs, que nous allons conter en finissant. M!]e Mars donnait des représentations à Lyon, lorsque, le lendemain même de la première, elle vit entrer chez elle un des fabricants de soieries les plus connus de la ville : — Madame, lui dit-il, vous pouvez faire ma fortune. — J'en serais fort aise, Monsieur; mais par quel moyen? — En acceptant cette pièce d'étoffe. Notre homme déploya une pièce de magnifique velours épingle. — Faites de ceci une robe. Lorsqu'on l'aura vue sur vous, toutes les femmes en voudront porter de semblables, et c'est ainsi que ma fortune se fera. — Mais, Monsieur, jamais femme qui se respecte n'a porté une robe jaune !... — C'est précisément pour cela, Madame, qu'il s'agit de mettre cette couleur à la mode, et nulle au monde ne peut mieux que vous... Ne me refusez pas; acceptez, en grâce. — Non, Monsieur, je ne vous refuse pas, répond la cé- lèbre actrice, en se disposant à payer le prix de l'étoffe. — Hé! Madame, que prétendez-vous faire? s'écrie le négociant. Je ne sollicite de votre part qu'une faveur : celle de faire connaître l'adresse de ina fabrique. M,le Mars, trouvant l'idée originale, céda et promit. De retour à Paris, elle fit confectionner la robe, et, le soir de sa rentrée, dans le rôle de Mme de Clainville, de la Gageure imprévue, elle attendait le moment de paraître en scène, revêtue de la splendide robe jaune, lorsqu'un dernier regard jeté sur la glace fit subitement naître un doute dans son esprit : elle se trouva ridicule et déclara qu'elle ne jouerait pas. L'heure était trop avancée pour qu'il fût possible de com- poser un autre spectacle. Cette résolution soudaine jeta le