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                     UNE FEMME MUNIE                     $$

souverains avaient porté la gloire, jusque sur le premier
trône du monde, celui de la papauté, dans la personne
d'Amédée VIII.
    Gaspard de Mornieux, âgé de cinquante ans, guerrier
courageux, capitaine habile, n'avait aucune des vertus
qui font aimer. Fier, cruel, vindicatif, d'une humeur fa-
rouche, incapable de délicatesse et de générosité, il sem-
blait né pour la haine, la jalousie, lespassions violentes.
 Epoux d'une femme charmante, Cécile de Nuffray, d'une
 ancienne famille du Dauphiné, il n'avait eu pour elle ni
 tendresse, ni dévouement, ne pouvant lui pardonner de
 ne lui avoir point donné d'héritier de son nom, ce qui
 faisait passer, après lui, le âef de Gramont à son frère,
 Guillaume de Mornieux.
     Douce, pieuse, timide, la comtesse Cécile avait passé
 sa vie dans la tristesse et les regrets. Les longues absen-
 ces de son époux lui avaient seules laissé quelques beaux
 jours.
     Adorant sa fille, enfant remarquable par son intelli-
  genceetsa beautés elle trouvait dans cet amour seulement
  la force de vivre, Aimée de ses vassaux, elle leur faisait
  autant de bien que le lui permettait sa position dé-
  pendante.
      Un vieux moine résidait au château; craintif et timide,
  il tremblait devant le châtelain, se renfermait dans
   ses fonctions d'aumônier» et n'exerçait aucune influence
   sur Gaspard.
      Cécile» d'une santé délicate, he recevait personne, et
   jiè Sortait jamais du manoir. He fut dans ce milieu mé-
   lancolique, que Gabrielle de Mornieux ouvrit les yeux à
   la lumière et que, semblable à ces plantes vivaces qui
   grandissent à l'ombre, en dépit de tous les obstacles, elle
    devint forte, souriante et gaie, et sut plus tard se faire