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374             LE RAVW DE SAINT-ROMAIN

   De la rive où nous sommes, nous avons devant les
yeux le revers oriental du mont Thou, la Saône élargie
par un débordement, et la petite colline à la pointe de
laquelle est bâti Rochetaillée. Au pied du Thou, au bord
du fleuve, sont comme couchés les villages de Saint-
Romain etdeOouzon. Le premier, plus d'à moitié caché
par un pli de terrain et par les arbres qui entourent une
grande villa blanche, dont les jardins descendent jusqu'à
la route ; le second avec son église qui, de loin, paraît
taillée dans la montagne même, et son premier rang de
maisons baigné par les hautes eaux, ce qui lui donne
l'aspect original d'une marine italienne.
   Tout cela est si riant, si chaud de tons, que malgré la
bise et l'absence de feuillage on est tenté de se croire
dans la belle saison. La teinte générale est le jauned'ocre
foncé, couleur commune aux pierres des constructions et
à la plupart des carrières du mont Thou d'où elles sont
extraites. C'est doux et réjouissant à l'œil tout à la fois
et cela s'harmonise au mieux avec les vignes plus rouges,
les taillis fauves aux reflets violacés, et même les veines
blanches des calcaires, dont les larges assises se
coupent comme des falaises du haut en bas de la mon-
tagne.
   Nous contemplons ces belles choses tout en marchant
et ne tardons pas à rencontrer à notre gauche un che-
min qui croise la voie ferrée par un passage à niveau.
Nous le prenons, et en le remontant, le Cindre nous ap-
paraît sous un jour tout nouveau ; sa croupe extrême,
ainsi que ses derniers épaulements sont revêtus d'épais
taillis qui, à distance, semblent des futaies ; en même
temps, toute la partie de la montagne qui nous entoure
ne nous présente que des mamelons boisés, et, pendant
un instantj on peut se croire transporté dans quelque
vallon forestier.