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TOUSSAINT DECHAZELLE 365 que les souscriptions organisées atteignirent un chiffre si important qu'on ne put employer tous les fonds en- caissés. M. Dechazelle se montra à la hauteur des cir- constances. Par des démarches actives, il obtint de ses commettants, de l'Allemagne surtout, des commissions en abondance telle qu'aucun de ses ouvriers ne se res- sentit de la crise. Depuis quelques années, la fabrique lyonnaise s'est prise d'un grand goût pour les étoffes des siècles passés. Recherchés avec ardeur, ces matériaux ont fourni un ali- ment nouveau et des plus heureux à l'imagination de nos artistes. M. Dechazelle avait devancé notre époque. Mal- gré la défaveur attachée alors à tout ce qui venait du moyen-âge, tenu pour barbare, il rechercha avec soin toutes les antiquités, fouillant dans les sacristies et jus- que dans les tombeaux. Il trouva dans ces richesses dé- daignées des ressources merveilleuses surtout pour l'art " de la broderie qu'il poussa à un point extrême de per- fection. Du reste, le champ de ses observations était sans limites : les vieux manuscrits, les porcelaines, les collections d'insectes, d'oiseaux, les minéraux, les pa- pillons exotiques, les coquillages, tout servait d'aliment à son imagination sans cesse à la recherche. Pour l'exé- cution, il était également toujours en quête d'innova- tions. C'est ainsi qu'il imagina d'introduire, dans ses broderies si parfaites, les plumes naturelles, les cheveux et jusqu'à des brins de paille. La réputation si répandue de la maison de fabrique * dont M. Dechazelle était l'âme avait eu pour conséquence naturelle d'augmenter sa fortune dans une très-forte proportion. Mais nous touchons à l'époque où, sous pré- texte de réforme et de progrès, la Révolution semait partout la ruine, la désorganisation et le meurtre. Ré-