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                  LA BATAILLE »E NÉZIB                 179

Soliman et, traversant la route qui, de l'ouest à l'est,
allait d'Alep à Bir et à l'Euphrate, dépassa la petite
ville de Nézib comme si elle eût voulu l'envelopper.
   Deux mille Hanadès, éparpillés sur sa ligne extrême,
voltigeaient de toute la vitesse de leurs chevaux autour
de l'infanterie ottomane que leur manœuvre inquiétait
pendant que l'infanterie égyptienne les menaçait de
front ; mais malgré ces sollicitations, les Turcs demeu-
raient immobiles et de ces deux peuples en présence
aucun n'osait engager l'action.
   Ce fut Ibrahim qui le premier sortit du repos.
   Dans sa fougue impétueuse et irrésistible, il enlève
son aile droite, entraîne sur ses pas quatre régiments de
cavalerie et deux d'infanterie, et, sous le canon de Soli-
man, aborde l'aile gauche ottomane couverte simple-
ment par un bois d'oliviers. Le centre était protégé par
des redoutes faites à la hâte par les Prussiens ; la droite
par des ravins abrupts que la cavalerie n'aurait pu esca-
lader. Avec une audace inouïe, cavalerie et infanterie,
à l'exemple du chef, courent à la colline, mais à peine
sont-ils à portée, que la crête du mamelon s'enflamme,
les batteries tonnent et jettent leurs boulets dans les
rangs égyptiens ; la fusillade crépite sur toute l'étendue
 de l'armée, mais rien n'arrête l'attaque et les deux peu-
 ples rivaux, enfin à portée, s'égorgent et se massacrent
avec toute la fureur qui depuis si longtemps couvait dans
leur sein.
   Car cette haine si vive ne datait pas d'hier. Dans
leur élan furieux, les Egypt ; ens sentaient renaître cette
immense animosité que leurs pères des premières dynas-
ties avaient ressentie contre les races maudites de la
 Mésopotamie, de l'Assyrie, de la Perse dont ils avaient
 renversé les royaumes. Sous Thotmès I, Thotmès II,