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•138                 LE SALON DE 1 8 7 8

coloriste, qui sait les ressources qu'on peut tirer de la lu-
mière. Sa Canzonetta est toutefois un peu singulière de
poses et d'allures ; il y a dans le nombre des tableaux ex-
posés plusieurs sujets d'un décolleté suranné, voire même
la Coquetterie de M. Gilbert — le titre est indulgent — que
l'habileté ne suffît pas à racheter. Le public est entière-
ment revenu de ces fadaises de mauvais goût.
    J'aime cent fois mieux les costumes Louis XIII de M.
Brillouin, avec leur chatoiement un peu vulgaire, leur
cliquetis d'armes, leur effet de coup d'œil, dont l'idée est
absente. Dans le même genre, il faut citer le tableau de
 M. Martin, Le Naturaliste dans son cabinet, qui figurerait
 très-avantageusement chez un amateur d'histoire natu-
 relle.
     Voici maintenant deux grandes toiles à prétentions. Ce
 ne sont pas celles de M. Chataud, vous savez, M. Chataud
 avec ses mosquées aveuglantes et ses personnages de
 toutes les couleurs. Cette année, cet artiste a fait plus
 petit et je crois qu'il a eu raison ; sa palette n'y perd rien
 et le dessin ne fait qu'y gagner. Ses négrillons Dans une
 rue d'Alger ne manquent pas d'un certain charme. L'une
  des grandes toiles dont je veux parler est d'abord celle de
 M. Lenoir, faroux, le dompteur d'Agra\ Ah! s'il y a
  un coloriste au monde, c'est M. Lenoir, n'en déplaise à la
 physique qui prétend que le noir est l'absence de la cou-
  leur. Nous tombons dans une scène des Mille et une
  Nuits ; le dompteur en question fait sauter des tigres à
  travers un cerceau et l'assistance bariolée qui assiste à la
  représentation ne semble pas plus effrayée que si elle
  avait affaire à de simples clowns du cirque Américain ;
  tout n'est qu'habitude en ce monde. On rit devant ce
  salmigondis de nègres et de mulâtres vêtus d'étoffes étin-
   celantes. Il faut reconnaître pourtant qu'à défaut d'un