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                      KENÉ DE LUCINGE                       387

versation roulait sur Oechioli ; on exaltait sa valeur, ses
exploits à Rhodes ; on assurait qu'il était gentilhomme et
plein de courtoisie, qu'il était chrétien et qu'il serait facile
d'en obtenir la paix. Toutes les dames de la cour brû-
laient du désir de le voir, de le connaître; tout à coup,
la porte s'ouvre ; un vieillard, revêtu d'un costume orien-
tal, se fait annoncer comme marchand de bijoux du sérail,
et prédisant l'avenir ; il s'incline devant la duchesse et
demande à l'intéresser quelques instants par sa science :
un jeune esclave qui l'accompagne étale devant la société
des élixirs, des flacons, des bijoux, du corail. Marguerite.
voyant dans cette visite un moment de distraction pour
ses dames, permet à l'inconnu de parler. Il s'exprime
alors dans un langage moitié italien et moitié français, et
regardant tour à tour les mains de Marguerite, de Blanche
de Viry, d'Hélène de Blonay, de Jeanne de Gribaldi,
d'Agnès de Stapiano. toutes jolies, rivalisant de grâces
et de beauté, il leur annonce bonheur, succès, joies de
l'esprit et du cœur.
   — Vous êtes, vieillard, un heureux prophète, dit la
duchesse ; et de la guerre qui s'annonce, que nous dites-
vous ? .
   — Que Votre Seigneurie a plus de feu dans ses beaux
yeux que n'en allumera le chef de ses ennemis, et qu'il
ne dépend que d'elle de donner la paix où d'autres atten-
dent la guerre.
   — Vous parlez par énigme, magicien ; nous ne pou-
vons vous comprendre.
   — Je livre mon secret à Votre Seigneurie, Madame,
reprit le Turc ; il n'a fallu à vos yeux ni philtre ni magie
pour vaincre celui qui faisait naguère trembler un vaste
 empire. Puis, appelant son esclave, il vendit des flacons
 et des bijoux, et s'approchant de Marguerite, il lui dit :