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86 LES BIBLIOTHÈQUES DE LYON Le vainqueur ne pouvait, cependant, pas croire à sa complète victoire, et il se demanda môme s'il oserait marcher sur Paris comme nous avions jadis marché sur Berlin. Il pensait que la France, honnête, unie, donnerait encore son dernier enfant et son dernier écu pour la dé- fense de son sol et opposerait, de nouveau, une formidable résistance. Mais il ne connaissait pas notre France mo- derne. Il ne savait pas qu'une stupide opposition avait refusé naguère au maréchal Niel le moyen facile de doter la France d'une solide armée territoriale, quand déjà , après Sadowa, la Prusse faisait, en secret, ses immenses armements en vue d'une invasion de la France. « Vous voulez faire de la France une caserne, » disaient ces ignares législateurs, et cependant déjà toute la Prusse était une caserne et toute l'Allemagne armée. Il ignorait aussi que la démagogie guettait, avec avidité, le moment de faire une nouvelle révolution.... et quelle révolution? Voilà ce que les Prussiens, vainqueurs à Sedan, igno- raient, et ils ne pouvaient pas supposer non plus que peu de jours après, un bien coupable ambitieux livrerait Metz et sa belle et solide armée. Nous avons donc eu, à la fois, la honte d'une écrasante défaite avec la douleur plus poignante encore d'une révo- lution odieuse, en présence de l'ennemi envahisseur du sol sacré de la patrie. Et cependant, sans ce forfait, on pou- vait encore songer, sinon à un retour de la fortune, — parfois si capricieuse, — mais au moins à une paix meil- leure.... Il nous restait, en effet, une armée conduite par un vaillant soldat, des généraux de mérite qui ne désespé- raient pas de la situation. Les mobiles pouvaient fournir un nombreux contingent, et une dictature militaire res- pectée, secondée par tous les honnêtes gens groupés autour