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58 LETTRES ARCHÉOLOGIQUES SUR LE FOREZ. ment chrétienne. Et, chose étrange! dans ces forêts qui avaient retenti des vieux chants druidiques , dans ces lieux qui avaient entendu comme les derniers accents de la patrie expirante, autour de ces autels de pierre qui avaient vu couler le sang des sacrifices humains, d'hum- bles cénobites vinrent, annonçant un Dieu de bonté et d'amour, enseigner une doctrine nouvelle toute de cha- rité et d'apaisement ! A quelles règles obéissaient les membres des premières communautés chrétiennes ? Quels statuts les régissaient ? On l'ignore, car aucune loi générale n'étant encore sur- venue pour réglementer ces aggrégations religieuses, chaque association avait ses mœurs, son genre de vie particuliers. Ce ne fut que vers le commencement du cinquième siècle, entre 400 et 410, qu'Honorât et Ca- prais, revenant d'Asie où ils avaient étudié les règles monastiques, introduisirent les premiers en Gaule les pratiques de l'Orient et fondèrent dans l'île de Lérins, sur les côtes de Provence, un monastère qui ne tarda pas à servir de modèle à bon nombre de fondations nouvelles. Tout ce qu'on racontait alors des pieux solitaires de la Thébaïde, tout ce que l'on disait de leurs vies saintes et austères, s'écoulant sous la lauredes Pacôme ou sur la colonne des Siméon, excita dans l'Occident un vif et profond enthousiasme, et poussa au désert tous ceux qui voulaient gravir les hauteurs de la perfection chrétienne. Puis à ces pensées de pur ascétisme succéda, dans la fondation des monastères, un grand motif social. Le vieil empire romain venait de se dissoudre sous le souffle des barbares ; la société antique disparaissait emportée par «> le flot de l'invasion, et une anarchie sanglante rempla- * çait partout la civilisation venue des bords du Tibre. Alors, fuyant devant les Goths et les Franks vic(o-