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                 APPROCHE, SI TU ES HARDI '•               69
    Le logement de la défunte resta longtemps abandonné,
 mais dans un certain office bien relégué, reculé au coin le
 plus noir, le plus solitaire; le plus peureux, avec une
 étroite fenêtre, on entendit après quelques semaines comme
 un bruit singulier ; on vit comme des lueurs. Plaintes,
 sifflements, petits cris, bruits de chaînes, bruits sourds,
frôlements, trot et galop, remue-ménage, assiettes cas-
 sées, voilà une âme en peine !
    — Ah ma pauvre maîtresse, dit l'ancienne servante,
elle revient, faut dire des messes, des prières ; faut aller
quérir son parent, M. le maire. Elle m'a donné ses cartes,
qui sont devineresses, et ses cartes m'ont dit qu'elle ré-
clame des Deprofundis. Avec ce jeu, je peux savoir l'ave-
nir ; la morte m'a rendu un grand service ; je vais m'établir
tireuse.
   On pénétra dans l'office hanté, une troupe de rats gri-
gnottait des pois chiches, lesquels, tombant de leurs cosses
parcheminées sur les assiettes retentissantes, causaient
tout le sabbat, mais les messes furent dites.
   La première personne qui consulta la sorcière fut une
dame qu'on avait volée de quelques poules et de menus ob-
jets. Elle fit grand bruit, dit beaucoup de paroles, non pas
dans l'espérance de trouver le voleur ; mais une sainte
peur prit le coupable, il reporta en cachette les objets et
les poules toutes plumées.
   La seconde consultante de (a sorcière fut une fille laide
et amoureuse. La pauvre enfant était un peu dédaignée.
En sortant de chez la devineresse elle rencontra un veuf
vieux et gredaud, mais riche. Et la réputation de la femm
d'Oudan fut faite dans toute la montagne.
   Il y venait surtout des conscrits désireux de savoir qu
numéro ils devaient apporter. Si bon, ils payaient géné-
reusement; si mauvais, la simple passe, c'est-à-dire deux
fois trente sous ; car il y avait deux jeux : le grand et le
petit, à la volonté d'un chacun. Un jour le vigneron du
Sancé avait perdu son saint frusquin et, de désespoir de le