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LE PAGE DU BARON DES ADRETS. 4,33 austères et par l'éloge d'écrivains qui vantèrent sa vertu à l'égal de son talent En voyant les tendres caresses que se prodiguaient la grande poète et l'humble servante, le petit apprenti flaira un mystère; ses yeux, démesurément ouverts, contem- plaient le groupe charmant qu'un peintre eût envié; un sourire malin errait sur ses lèvres. Avide d'aller raconler une histoire à l'atelier, il fit mine de s'éloigner. Mais, prompte dans sa résolution, devinant sa pensée, Louise le retint avec autorité : — Attends-moi, dit-elle. Et emmenant à deux pas Marianne, qu'elle serrait dans ses bras, surveillant du regard le petit apprenti, qui frémissait du désir de s'en aller, elle écouta le long récit, semé d'angoisses et de soupirs, de celle qu'elle avait vue naguère triomphante et choyée au château de Pierre-Scize. Louise était une femme d'action autant que de pensée. Son plan fut bientôt tracé. — Avec des jeunes filles peureuses et tremblantes, dit-elle, nous aurions de la peine à réussir ; avec vous, cela sera facile. Beaumont est actif; mais les soucis que lui donnent la ville et l'armée tiennent autant de place dans son esprit que sa colère, sa vengeance et son amour. Il va partir, et ses ordres ne seront ni aussi prompts, ni aussi précis que s'il vous poursuivait lui-même. Pendant qu'il va délibérer, nous agirons, et, ce soir, nous serons hors de ses atteintes. — Auriez-vous l'intention d'exposer votre vie pour nous? dit Marianne, avec anxiété. En ce cas, je n'ac- cepte pas vos offres, et je reste, dussé-je me remettre moi-même entre ses mains.