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432 LE PAGE DU BARON DES ADRETS. En ayant moins que moi d'occasion, Et plus d'estrange et forte passion, Et gardez-vous d'être plus malheureuses ! A ces beaux vers, dits avec le sentiment profond d'un poète ému, Marianne, tremblante, le sein oppressé, se jeta dans les bras de Louise, et la passion, l'admiration l'emportant sur la prudence, elle inonda de ses larmes les joues pourprées de la jeune femme. Cet hommage à son talent parut lui plaire. A son tour, elle rendit baiser pour baiser. Louise était en ce moment dans tout l'éclat de sa mer- veilleuse beauté. Ses traits ravissants, que les poètes ont chantés, étaient illuminés de cette flamme intérieure que donnent l'intelligence et le génie. Leur pureté était rehaussée par l'expression, et les peintres brisaient leurs pinceaux quand ils voulaient reproduire son visage. Sa peau blonde et d'une extrême délicatesse, avait les reflets charmants de la rose des buissons et un velouté dont le soleil des Pyrénées n'avait pas altéré la douceur. Grande, admirable dans sa taille, elle prenait un embonpoint naissant qui faisait ressortir la perfection de ses formes. On ne savait si on devait admirer plus l'opulence de sa chevelure, d'un blond doré, la délicatesse de sa bouche, l'arc de ses sourcils noirs, la petitesse de son pied, ou l'élégance de sa démarche, qui la faisait ressembler à une reine. Par-dessus tout, elle était bonne, et les pauvres connaissaient sa générosité. Poursuivie de traits méchants, elle vit prendre pour des réalités les jeux de sa muse badine. Elle connut les amertumes de la calomnie et de la satire, et fut à peine consolée par de chastes amitiés, par l'estime de gens