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480 LE PAGE DU BARON DES ADRETS. Le baron croisa les jambes, tira ses tablettes et atten- dit la réponse du prévôt. Si tu n'as pas bonne mémoire, je t'aiderai, ajouta-t-il. Mais le malheureux prévôt ouvrait en vain les yeux et la bouche, il ne pouvait articuler un seul mot, tant son saisissement était grand. Alors un moine vint au secours de son supérieur . c'était le trésorier. Il s'inclina profondément. Un énorme trousseau de clefs pendait à sa ceinture. — Tes fonctions, dit le baron des Adrets? — Monseigneur, je suis trésorier. — A merveille, alors tu vas me répondre, et sois franc. — Oh ! je vous dirai toute la vérité, Monseigneur, comme à confesse. Depuis longtemps uue partie de nos trésors sont épuisés; la cause en est aux grandes répa- rations que l'abbé d'Albon, notre vénéré supérieur, a fait faire dans toutes nos églises, nos couvents et sur- tout nos châteaux , que le roi nous a ordonné de réparer. De plus, nous avons bâti un hôpital et fait de grandes aumônes au peuple, par ce temps de disette. Ce qui nous reste, nous vous le donnons parce que vous l'exigez; mais tout cela, Monseigneur, est le bien de Dieu et des pauvres. Pour nous , il nous faut peu, notre règle est sévère. Le baron des Adrets poussa un rire homérique. — Vous donnez tout aux pauvres. Et le vin de tes caves, le meilleur du monde, est-il pour les pauvres ? et le baron des Adrets entra dans une grande fureur. — Qu'on me saisisse ce coquin et qu'on lui prenne son trousseau de clefs. Mais le moine était d'une extrême