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LA SOIERIE Avant qu'il pût briller sous sa forme dernière, Quelle métamorphose un tissu doit subir ! Une graine sera la matière première ; Par la chaleur éclos un ver en doit sortir. L'éleveur le nourrit, sait aider sa nature Et lui faire produire un cocon merveilleux Qui lui-même, à son tour, va dans la filature Développer ses fils nombreux. Dirai-je les apprêts et les soins que réclame Cette soie encor vierge et sortant du moulin, Avant qu'elle devienne et la chaîne et la trame Qui du bruyant métier provoqueront l'entrain ? Le travail qu'elle exige à d'honnêtes familles Fournit le vêtement et leur donne du pain ; Et, pour se faire ourdir, elle offre aux jeunes filles La vie et l'honneur par le gain ! Unis, brochés, et vous, que la lame sépare, Velours, doux au toucher, dans vos froufrous joyeux, Chuchotez doucement : « Que de nous l'on se pare!... « Madame, en nous prenant, vous ferez des heureux. « Jeune et coquette enfant, pour briller au village, « Nous t'avons réservé nos voyantes couleurs ; 21