Revue du Lyonnais » série 3 - n°6 ( 1868 ) » pp.237

                      J'AI RETROUVÉ M CRAIE.
                                     A                              237
« où mon œil reconnaît tant de choses matérielles, mon
« cœur n'y retrouve plus rien,
  « Ah! lorsque bouillonnant de joie, j'écrivis ces mots,
« aurais-je pu prévoir que je ne les- reverrais aujourd'hui
« que pour me faire mieux sentir l'isolement où le sort
« m'a jeté, et qu'un morceau de craie alors retrouvé, me
« ferait amèrement songer à toutes les pertes que j'ai faites
« depuis. »                                   J. PETIT SENN.

                   CHRONIQUE LOCALE
   La campagne est en liesse. Chasse et vacances, lièvres et écoliers,
 alouettes et pensionnaires, clé des champs, vendanges, fête dans les
familles, joie et bruit, voilà le bilan.
   En ville, solitude, tout le monde a fui. Les pensionnats ouverts, les
parents sont partis ; les médecins sont aux eaux avec les malades ;
les tribunaux sont fermés, les concerts font relâche, M. de Croze est
en Bavière ; à peine voit-on de loin en loin un fiacre ou un piéton qui
erre désorienté dans le silence de nos rues. Cela durera ainsi jusqu'à
la Toussaint.
   Pour combler ce vide, on a organisé la fête des fleurs. L'Exposition
d'horticulture a été naturellement plus belle encore cette année que
les précédentes. Ce sont toujours MM. GuiUot, Fillion et Boueharlat
qui ont fait rafle des prix. Le local est toujours au Palais-des-Arts,
l'entrée est toujours de 25 centimes; ce sont toujours les mêmes visi-
teurs ; il n'y a de changé que les musas, les canas, les bégonias, les
philodendrum crenulatum, les dieffenbachia, les sancheria, les maran-
tha, les ptéris, les cycas, les zamia et les alocazia machroryza, ouf!...
qui ont remplacé les œillets et les roses pour la plus grande joie des
jardiniers et des savants, la honte et la consternation des autres.
   Ah ! que nous serions tenté de nous écrier comme Mme George Sand,
dans les Sept cordes de la lyre : « Pauvres petites fleurs, si on m'obli-
geait à retenir vos noms savants, comme je cesserais de vous aimer ! »
mais les jardiniers aiment-ils les fleurs? ceci n'est pas jugé.
   Cette exposition a eu du moins l'immense avantage d'augmenter la
quantité de décorations, de mentions, de médailles, de distinctions,
de récompenses et d'encouragements dont, par ce temps d'égalité, nous
sommes tous si avides. On a couronné, que c'était une bénédiction,
une pluie, une avalanche ; et on a bien couronné ailleurs : aux courses
de Chàtillon-les-Dombes, aux courses de Peurs, à Vienne, à Saint-