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236 J'AI RKTUOUVÉ MA CHAIË. avec charme les anecdotes relatives à son séjour eu Italie, dont il était revenu depuis peu. MM. Mouchon, Thouron et Anspach, trois ministres protestants, les deux premiers, enthousiastes de Jean- Jacques Rousseau qu'ils avaient connu, le dernier, auteur de plusieurs livres de théologie fort estimés. M. Pourtalès, enfin, le plus habile des négociants de son temps, qui, durant ses courts passages dans notre ville, amarrait quelques instants sa constante activité chez mon grand-père, son ami et comme lui Neuchâtelois. On concevra aisément le plaisir que je goûtais dans ce cénacle d'hommes tous remarquables à divers titres, et comme je devais contempler avec intérêt le salon où j'eus le bonheur de m'asseoir au milieu d'eux. Mais un incident vint troubler ma rêverie et y mettre fin. Une des fenêtres de la chambre occupée autrefois par mon grand-père s'ouvrit avec fracas, une figure qui m'était étrangère y parut et me lança des regards inquiets, témoi- gnant la méfiance et la surprise. Hélas! cette fenêtre où si souvent j'avais été salué et accueilli par un sourire plein d'aménité et de bienveillance , maintenant un visage soupçonneux et presque menaçant m'en repous- sait. . . Je tournai de ce pas l'édifice pour sortir de la campagne, et comme je regardais encore une fois sa façade du côté du nor.d, je reconnus avec émotion les mots écrits par moi il y avai* cinquante ans : J'ai retrouvé ma craie ! Le temps et la pluie avaient bien affaibli quelque peu la teinte des lettres , mais cependant elles étaient encore lisibles, surtout pour le vieillard qui les avait tracées enfant. « Quoi, me dis-je, de tout le bonheur qui m'entoura « jadis dans ces lieux, il ne reste plus que ce faible ves- « tige ? Cet album animé de rua rieuse et folâtre enfance,