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CINQ-MARS ET DE THOU. 55 témoigna une plus grande fermeté d'esprit qu'aupa- ravant. Quelque temps après, M. de Thou étant arrivé, demanda un doigt de vin et puis entra dans la chambre (du Conseil), y étant appelé. On dit qu'étant interrogé s'il n'avoit point sçeu la conspiration de M. d'Effiat, il répondit en ce sens : « Messieurs, je vous puis nier absolument que je l'aie « sçeue, et il n'est pas en vostre pouvoir de m'en con- « vaincre, puisque M. de Cinq-Mars seul peut témoigner « contre moi, car je n'en ai parlé ni escrit à homme du « monde. Or, M. de Cinq-Mars étant accusé et complice, « ne peut pas estre un bon témoing ni suffisant pour « me convaincre, puisqu'il en faut deux irréprochables « pour condamner (1) un homme, et ainsi vous voyez « que ma vie et ma mort, ma condamnation ou abso- « lution, selon les lois et la justice, dépendent de moy; « pourtant, Messieurs, je l'advoue, et je confesse que « j'ay sçeu cette conspiration, et ensuite je me rends « coupable, et ce pour deux raisons : la première est « parce que durant les trois mois de ma prison j'ay « étudié la mort et ay considéré depuis la vie, et j'ay « connu très-clairement que de quelque vie. dont je < puisse jamais jouir en ce monde elle sera toujours . « malheureuse. Le visage de la Mort m'a semblé plus « beau, et je l'ay trouvée plus avantageuse et l'ay em- « brassée comme une grande preuve de ma prédestina- «• lion, et j'ay crû que Dieu me faisant tant de grâce, « j'aurois peut-être quelque jour regret d'avoir laissé « échapper cette belle occasion, de laquelle je me veux (1) Sans doute pour faire condamner.