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486 MUSIQUE DRAMATIQUE. C'est une mélodie brève , timide , légère, et tandis que la musique italienne définit, épuise l'affection et vous l'im- pose , elle l'approche voilée, mystérieuse comme dans un songe. — La musique italienne vous entraîne par force jusqu'aux derniers termes de la passion , la musique alle- mande vous indique la voie, puis elle vous abandonne. C'fst une musique de préparation profondément religieuse, mais sa- religion n'a pas de symbole , el par suite pas de foi active traduite dans les faits; elle n'a pas de martyrs ni de conquêtes ; elle vous entoure d'une onde musicale pleine d'harmonie et excite votre cœur et votre imagination, mais dans quel but? Dès que les instruments se taisent, vous re- tombez dans le monde réel avec la conscience d'un monde meilleur que vous ne sauriez atteindre. Ainsi pour conclure: à la musique italienne manque l'idée qui sanctifie l'action, à savoir la pensée morale, le baptême d'une mission, et à la musique allemande manque l'énergie et la force pour l'ac- complir, l'instrument matériel de la conquête, ia formule de la mission. En d'autres termes, la musique italienne s'épuise dans le matérialisme et la musique allemande dans le mysti- cisme (1). C'est ainsi que procèdent les deux musiques, el j'affirme que tant qu'elles ne se confondront pas harmoniquementen- (1) « C'est par la manière de traduire l'idée mélodique que se distin- tinguent les deux écoles. Les Italiens la confient de préférence à la voix humaine qu'on pourrait considérer comme l'organe choisi de l'unité du dogme, et ils l'accompagnent d'une harmonie où domine la consonnance, et dans laquelle les ondulations ne sont que des péripéties ménagées d'un motif principal. Les Allemands, au contraire, la distribuent aux différents instruments de l'orchestre, expression de la liberté et de la fantaisie, et ils la font passer à travers une succession de dissonnances et de modulations mordantes, comme un filet d'eau à travers les fentes d'un rocher. » (Scudo. toc. Cit.)