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MUSIQUE DRAMATIQUE. 487
semble et ne se dirigeront pas vers un but social, il n'y aura
pas de musique sociale. Et si jamais quelque génie bien-
faisant les réunit dans un juste tempérament, la sainteté de la
foi qui caractérise l'école allemande bénira la puissance d'ac-
tion qui frémit dans l'école italienne, et l'expression musi-
cale résumera les deux termes fondamentaux : l'individualité
et la pensée de l'univers : Dieu el l'homme.
Est-ce là une utopie? — La musique de Rossini aussi
était une utopie aux temps de Guglielmi et de Piccini. Et la
poésie immensément synthétique de Dante, lorsque l'art
était relégué dans les ballades des troubadours provençaux,
était aussi une utopie, et celui qui, dans ces temps-15, aurait
prédit qu'il viendrait un poète qui résumerait le ciel et la
terre dans ses poèmes, qui tirerait tout, langue, forme, puis-
sance, de son propre génie, qui concentrerait dans ses vers
toute l'i'me du moyen-âge, plus la conception de l'ère future,
qui d'un cantique ferait un monument national et religieux,
qui, cinq siècles avant les premières tendances et les pre-
miers développements d'une civilisation douteuse, consigne-
rait dans ses livres, incarnerait dans sa vie le principe de la
mission italienne en Europe; ce prophète là , dis-je, aurait,
comme la Cassandre antique, prêché dans le désert; et ce-
pendant Dante parut et il fonda; et de ses écrits on déduit Ã
l'heure qu'il est les augures des destinées italiennes.
Ne désespérons donc pas de l'art, ni de sa puissance, ni
des miracles que le génie peut en tirer. Eh quoi! une syn-
thèse, une époque, une religion s'est gravée en pierre ; l'ar-
chitecture, qui exprime l'idée de l'espace, a pu résumer dans
une cathédrale la pensée dominante do dix-neuf siècles, et la
musique, qui exprime l'idée du temps, ne le pourra pas? La
musique qui est la reine des arts, seule parmi les arts et les
sciences restera étrangère à la synthèse européenne, a l'épo-
que? La terre où sont nés Scarlatti, Jomelli, Porpora,