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VOYAGE DE LYON A YENNE. 393 précie peu la perdrix. Ce qn'il lui faul, ce sont de grands massacres de faisans, de chevreuils et de coqs de bruyère. — Je me demande où le bon jeune homme a vu massacrer en grand les coqs de bruyère. Il appelle Léon Bertrand : mon brave ami. Vingt, quarante, cinquante pièces le satisfont à peine ; une meute de trente chiens lui semble insuffisante ; il estime surtout les bons piqueux. Du reste, rien de possible sans un hunier, une culotte de daim, un frac rouge, une casquette de chasse, un couteau de chasse, un fouet de chasse, un lorgnon de chasse, une pipe de chasse et sans douie une blague de chasse Cel entretien cynégétique nous conduit sous les casemates de Pierre-Châtel. La forteresse est assise sur un massif calcaire, isolé de la chaîne principale par une ravine pro- fonde et par la gorge où coule le Rhône. Le massif percé, fouillé, miné comme un fromage véreux, encombre les bords du fleuve de gigantesques èboulemenls. Une énorme muraille de rocher suit les sinuosités du défilé et forme deux passages à des hauteurs inégales. Le plus bas sert de lit à la rivière. Le plus haut, large à peine de 3 ou 4 moires, sombre, humide, à demi recouvert par des parois qui surplombent, est un long couloir où serpente la roule de terre. On appelle cette double coupure les balmes. Nous donnerons plus loin quelques no- tions historiques recueillies sur les lieux mômes, au sujet de Pierre-Châle!, ancien couvent de chartreux. Il nous tarde d'arriver au but de notre voyage. Nous débarquons au ponton d'Yenne pour remonter aus- sitôt dans le bachot du passeur qui doit nous transporter sur la rive droite. Le passeur est un vieillard de 65 ans. Ses mem- bres raidis et ses reins ankylose's se meuvent avec une pré- cision automatique; on dirait une vieille machine détraquée, mais fonctionnant encore par la force d'impulsion. Àvez-vous remarqué combien il est difficile d'avoir des ren-