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VOYAGE DE LYON A YENNE. 381 môme une conversation qui met en fuite les personnes honnêtes, Le capitaine envoie cette péronnelle à l'avant où elle fait les délices des mariniers et des blouses. Nous appro- chons de Miribel. Le train de Genève Aie sur la rive droite. De l'autre cote six chevaux efflanqués, dans l'eau jusqu'au poitrail, remorquent péniblement trois grandes barques. Où sont ces robustes boulonnais, à croupes doublées, qui fai- saient jadis le service du halage? La vapeur lésa tués?... non, la vapeur nous les rend attelés aux camions du chemin de fer, aux lourdes voitures de charbon, aux chamois de ballast, système des compensations. Tels quels, cet attelage, ces bateaux, ce conducteur chevauchant en amazone, ces ma- riniers manœuvrant un aviron formé d'un sapin entier se dé- tachent admirablement en pleine lumière sur les galets gris et sur les eaux bleues... Quelques saules, une baraque en pizé, un ciel a teintes chaudes où moutonnent de petits nuages cotonneux, et voilà un tableau digne d'Appian et de Corot. Miribel étage de jolies maîsonnet'.es sur un coteau tout verdoyant. Cinq ou six canots dansent, amarrés devant l'Hôlel de la Marine. L'un porte écrit à ia poupe : La Bellone... quel nom de guerre pour pécher aux goujons ! Le ponton nous jette un monsieur effaré, armé- de trois cannes, d'une ombrelle et d'un parapluie liés en paquet; il s'élance sur l'arrière, inquiet; court, hagard, sur l'avant, et revient, fié- vreux, s'asseoir sur les genoux de la dame au bec de courlis qui pousse des cris de héron ; de là , il roule sur le gros fumeur qui en bourre une aussitôt ; éjrase la pail-; de mon chien — à peu près, — renverse le bambin au sifflet, et finalement s'en- dort adossé au lancier de la comète. Une ombrelle, un pa- rapluie, de félourderie et du sans-gêne , soit !,.. Mais, pour- quoi trois cannes ?... Soudain, surgit des profondeurs de la caie une moustache