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404 UNE NOCE. au loin leurs chants et leurs voix joyeuses ; Frédéric et Louise, Claude et Marie suivis de la mère Bellouart sortirent en même temps des Ormoyes ; Louise engageait son cousin à rentrer seul, et voulait, suivant son devoir de fille d'honneur, accompagner la mariée jusqu'au moulin de Sainte-Marthe. Elle rentrerait bien avec Batiste, assurait-elle, car Batiste était là qui était venu apporter à sa jeune maîtresse un manteau et un capuchon. Mais les mariés et la belle-mère se récriè- rent, se confondirent en remerciements et voulurent bien au contraire conduire les jeunes gens jusqu'aux Grandières. A moitié chemin cependant, ils consentirent à se retirer, car ils avaient encore à marcher vingt minutes, pour arriver au moulin. Alors Frédéric et Louise, suivis de Batiste, pri- rent par le chemin bas qui descend vers la Saône et la longe jusqu'aux prés des Grandières. La rivière s'enveloppait de cette belle robe de gaze blanche dont la pare l'humidité des nuits de septembre. Celte légère vapeur suspendue aux saules du rivage semblait y trembler par moments sous les rayons de la lune qui se levait mélancoli- que sur les hauteurs de Burgy. Au sortir de cette salle de bal, chaude et animée, ce paysage borné par les brouillards, éclairé par une lueur pâle et douce avait quelque chose de calmant pour l'âme;"aussi lorsque Frédéric, enhardi par l'émotion qu'il avait éprouvée et par celle qu'il avait surprise chez Louise, lui parla avec entraînement de son amour, Louise eut-elle sur elle-même plus d'empire qu'elle n'osait l'es- pérer. — Je vous aime, lui dit-elle, mais vous sentez bien que cela ne suffît pas pour l'union parfaite que je rêve dans le mariage, il faut nous connaître mieux que nous ne nous con- naissons et — Eh! quoi, je vous aime et vous avouez que vous m'ai- mez; n'est-ce donc pas assez? Que voulez-vous davantage?