page suivante »
ÉGLOGUES DE VIRGILE. 265 Virgile avait un goût prononcé pour les sciences physiques et naturelles, comme on le voit par l'églogue de Silène et comme il nous l'apprend lui-même par ces beaux vers des Géorgiques : Me vero primum dulces ante omnia musée, etc. Georg., 1. 2, v. 475 et Seqq. Si, malgré l'évidence des faits, on ne voulait pas admettre qu'il ait connu Hippocrate, il faudrait forcément accorder qu'il connaissait du moins Arislote. Ce savant naturaliste, dans son Histoire des animaux, fixe la durée ordinaire de la gestation a dix mois, comme Hippocrate : Homini uni multiplex parien- di tempus datum est; nam et septimo mense, et octavo mense et nono parère potest, scd plurinium decimo; nonnullse etiam undecimum tangunt (Hist. anim.,1. VII, c. 4,n° 5.) (19). On peut donc, sans pousser cette démonstration plus loin, conclure que Virgile était pleinement en droit de faire parler la poésie, comme la science la plus autorisée de cette épo- que. Ajoutons, enfin, que la science moderne n'est point en contradiction avec l'ancienne ; je me bornerai a cette citation : « C'est sur l'opinion d'Hippocrate que sont fondées les dis- positions du droit romain, reproduites dans notre législation actuelle ;.. notre code admet la légitimité des enfants nés le (19) Pline a plus lard reproduit dans son Histoire naturelle, 1. VIII, c. 4, ce passage d'Aristole sur la durée de la gestation. Après tout ce qui précède, on voit combien la note suivante manque de convenance et de vérité : « Virgile a dit decem menses; tous les commen- tateurs ont cherche à expliquer ces dix mois; un plaisant même a voulu établir que les femmes, du temps de Virgile, étaient enceintes dix mois, et plusieurs savants étaient déjà disposés à adopter cette opinion. » (Êglog. de Fwj.'trad. en vers franc, par F.-G. de Larochcfoucauld, Paris, 1812, in-12.) Cela prouve une fois de plus que, en voulant jeter du ridicule sur les hommes et les choses dans des questions qu'on a le tort de ne pas connaître, on risque fort de faire retomber ce ridicule sur sa tête.