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   UN AUTOGRAPHE DE NAPOLÉON Ier.


   Durant l'année 1828 , l'épouse de, M. B . . . , homme de lettres
distingué, fit ses couches à Genève et fut soignée par M. le doc-
teur M... Reconnaissante envers le célèbre opérateur et sachant
son goût décidé pour les autographes, elle lui offrit des lettres
écrites par les militaires français les plus distingués du temps de
l'Empire , lettres qui avaient été remises à son mari pour l'é-
clairer dans un travail historique important touchant cette épo-
que mémorable. Le docteur ne se fit nullement prier et accepta
tout d'abord , car il se doutait peu de l'importance extrême du
cadeau qui lui était offert. Madame B... le conduisit auprès d'un
coffre qu'elle ouvrit et qui était plein de papiers ; M. le docteur
qui croyait en recevoir quelques uns , fut aussi ravi qu'étonné
quand madame B... lui demanda dans quoi il voulait emporter ces
chiffons. Pris ainsi à l'improviste et n'ayant aucun récipient assez
vaste pour contenir le trésor qui était devant lui , l'adroit opéra-
teur saisit le pan de sa lévite, en fit un cornet très-capace et le
laissa remplir sans observations de sa part par l'aimable dame.
Puis, après mille remercîments étouffés par une charge plus em-
barrassante que lourde, il emporta, serré contre son sein palpi-
tant de joie, l'énorme paquet sur lequel reposait le dernier de
ses trois mentons.
   Qu'on juge de son ravissement lorsque , rentré chez lui et ex-
plorant sa riche capture, il trouva réunies des lettres de tous les
généraux de la Révolution , de tous les maréchaux de l'Empire,
puis, mieux que tout cela, une missive de Napoléon à l'amiral
Missicpsi, dans laquelle, après avoir dicté deux pages à un secré-
taire, l'illustre empereur avait pris lui-même la plume pour grif-
fonner douze lignes de sa main, au bas desquelles il avait apposé
son N gigantesque suivie de quelques caractères illisibles termi-
nant le mot de Napoléon, mais qui avaient, dans leur sinueux et
flamboyant désordre, tout l'air d'un paraphe.
   Jouir seul est un plaisir que ne conçoit pas mieux que moi
M. le docteur M... , aussi voulut-il de suite mettre ses amis dans
la confidence de son bonheur. Il invita à prendre le thé chez lui
les rédacteurs du Journal de Genève, dont lui et moi faisions
partie, puis après le goûter et la table étant desservie, il la cou-
vrit des innombrables parcelles de son trésor autographique ; là,
chacun de nous se récria d'admiration en y puisant tour à tour
des lettres du duc de Montebello , de Manu ont, de Masséna , de
Moreau, de Suchet, de Serrurier, de Davoust, un ordre du jour
de Kléber en Egypte, une proclamation d'Augereau, un billet de