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326 BEVUE DRAMATIQUE. et de l'attaque, et chaque fois que le ballet des Néréides est annoncé, il y a salle comble à notre Grand-Théâtre. Le supeès constaté, disons quelques mots de l'œuvre. L'introduction au premier acte est une légère esquisse d'ouverture genre classique allemand, dans laquelle est heureusement amené le motif de l'apparition de Nais. Dans l'évocation des Néréides, les violons divisés jouant en trémolos aigus avec sourdines, ont produit un effet qui a été remarqué. Au deuxième tableau, le morceau important comme facture est l'allégro appasionnalo è agilato à trois temps. L'harmonie y peint heureusement la colère de Beriba, le trouble et la crainte de Rodolphe et de Nais. Le second acte, comme drame et comme musique, est sans contredit un des plus importants. L'ouverture est un canon vigoureux à cinq parties imitant les diverses conversations qui s'établissent sur une place publique lorsque le peuple s'y rassemble. La péroraison de ce morceau est un double canon à huit parties réelles. Voilà ce que n'a pas dit le critique bienveillant du journal que nous avons déjà cité, sans le nommer toutefois. Il appelle un canon à huit parties réelles, un carillon qui a Vinlenlion d'annoncer la fête des Rois/ et parce qu'il s'y trouve, mêlées aux instruments, trois clochettes qui ont l'habitude de sonner les IVoces de Jeannette, le critique anonyme s'écrie : C'est l'ouverture des Noces de Jeannette ! Il faut de la bonne volonté pour faire un tel rapprochement.; et voilà , du coup, les cloches proscrites de toute partition, parce qu'elles ont servi aux Noces de Jeannette ! Avis aux compositeurs ! La marche des Rois est d'une bonne facture, quoique l'orchestre l'exécute sur un mouvement trop précipité, ce qui fait perdre au morceau la plus grande partie de ses effets ; ce qui parfois même amène quelque confusion à cause des traits difficiles des contrebasses et des trombones. Ce n'est pas que nous ne sachions aussi bien, que tout autre que dans un ballet le mou- vement de la musique est tout à fait soumis au mouvement de la panto- mime et de la danse ; aussi le reproche que nous faisons s'adresse-t-il plus au chef de ballet, qui pouvait modérer la marche de son cortège, qu'au compositeur dont la musique se trouvait sacrifiée à la mise en scène. Après la marche, vient la scène de la Fève, Le motif de cette scène est un scherzo symphonique traité avec le plus grand soin. Le final du deuxième acte est le morceau capital de l'œuvre : il est vigou- reusement traité. En résumé, le second acte est supérieur au premier, comme musique. M. Ward semble l'avoir travaillé avec plus de soin; l'orchestration est bien entendue ; il y a de la mélodie, beaucoup d'harmonie, du brio, et jamais de bruit. Parmi les danses, on a remarqué le Pas des Néréides sur le lac, dont le motif léger et découpé rappelle , par son harmonie imitative, le chu- choltement de la brise et le crépitement des flots ; Le Pas lie caractère dansé par M. Charles, un excellent danseur comique que nous ne connaissions pas encore, et quatre coryphées ; La Value des Bacchantes et le Pas de la Fortune. C'est donc un succès que nous enregistrons aujourd'hui, succès d'autant plus franc qu'il est consacré par le public. Pour prévenir une supposition qu'on ne manquera pas de faire, nous finirons ce compte-rendu en aver- tissant que les représentions des Néréides, quelque succès qu'elles con- tinuent d'obtenir sur notre scène, seront définitivement terminées le 15 avril, jour où la noivelle administration des théâtres prend possession