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MATTHIEU GU1GNÂRD. 173 Solliciter de l'argent pour sa quête. — Asseyez-vous, Monsieur, lui dit Guignard, Vous venez bien, quoiqu'il soit un peu tard. Alors il conte au curé qui se signe De son marché l'extravagance insigne; Comme il avait, dépourvu de raison, Dilapidé cette rame de cloche, Dont lui restait, strictement, en poche Un seul feuillet pour faire un dernier bon. Quand il' eut dit son histoire effroyable, Le bon curé se mit à réfléchir, Puis s'écria tout à coup. — Quel plaisir ! Si vous voulez, nous tromperons le diable. — Si je le veux? Monsieur, soyez certain, S'il le fallait que j'y mettrais ma main. — C'est bien, mon fils, je vous crois. Mon église N'est qu'une étable, il faut que je le dise. Un peu d'argent, et nous n'en avons pas, Réparerait, Monsieur, bien des dégâts Que je gémis de voir croître sans cesse. Cent mille francs donnés au nom de Dieu, Assurément vous gêneraient bien peu, Et vous vaudraient aide en votre détresse. — J'en donne deux, Monsieur, j'en donne trois, Si vous venez à me tirer des doigts Du créancier dont la dette m'oppresse. — Nous l'essaierons. Des trois cent mille francs Tracez, Monsieur, le billet que j'attends. C'est au porteur et n'a pas d'échéance. Bien, mon enfant, avant de recevoir Nous aurons soin, nous-même, de pourvoir A vous garer de toute arrière-chance