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ET DES MODERNES. 89 La question doit ici être scindée en deux parties distinctes ; Tune littéraire, la seule qui ait été réellement traitée et qui soit déjà connue; l'autre scientifique, à peu près inexplorée ou du moins tout à fait susceptible de nouveaux dévelop- pements. Nous aurions entièrement délaissé la première si elle n'était absolument nécessaire pour l'ensemble du tableau que nous avons a dérouler. Malgré toute l'activité qu'a déployée l'esprit humain depuis la renaissance, les anciens, sur le terrain littéraire, peuvent encore sans désavantage soutenir la lutte avec les modernes; il me serait facile d'apporter ici l'imposante autorité des témoignages les plus recommandabîes ; mais il vaudra mieux entrer directement en matière, et esquisser, à grands traits, dans une rapide ébauche, les points culminants de la pers- pective grandiose que nous présente l'antiquité. La première invention littéraire des Grecs fut celle de la poésie, et le premier nom qu'on rencontre celui d'Homère, que Platon surnomme le père des poètes, qui fut créateur de l'épopée et en a laissé dans Y Odyssée et surtout l'Iliade, deux modèles qu'aucun poème moderne n'a pu surpasser ni même atteindre, et qui enfin a joui de tant d'estime et de gloire que le nom de son détracteur, Zoïle, est devenu une injure, et celui de son éditeur, Aristarque, un éloge. Quand on entend dénigrer (b) ce grand poète, on est tenté (b) On lit dans Fontenellc: « Du temps d'Homère, c'étoit une grande merveille qu'un homme pût assujétir son discours à des mesures, à des syl- labes longues et brèves, et faire encore quelque chose de raisonnable. On donnoit aux poètes des licences infinies, et on se tenoit encore trop heu- reux d'avoir des vers. Homère pouvoit parler, dans un seul vers, cinq lan- gues différentes, prendre le dialecte dorique quand l'ionique ne l'accom- modoit pas ; au défaut de tous les deux, prendre l'attiqne, l'éolique ou le commun, c'est à dire parler en même temps picard, gascon, normand, bre- ton et français commun... Cette étrange confusion de langues, cet assemblage