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90 QUERELLE DES ANCIENS
de reproduire cette apostrophe que Laharpe adressait a La-
motte : « Apprenez le grec, Lamolte ! lisez Homère dans sa
langue, et si vous n'admirez pas assez ses beautés pour
excuser ses défauts, gardez-vous de le juger, car vous
serez seul contre trois mille ans de renommée et contre
toutes les nations civilisées ; et surtout gardez-vous de le
traduire , car c'est le seul mal que vous puissiez lui faire. »
« Ce qui frappe le'plus en passant de la lecture d'Homère Ã
celle de Virgile, c'est l'espèce de culte que le poète latin a
voué au poète grec... 11 imite l'Odyssée dans ses six pre-
miers livres, et l'Iliade dans les six derniers. On convient
que s'il a surpassé l'une, il est resté au-dessous de l'autre...
Quel homme que celui qui a servi de guide et de modèle Ã
un poète tel que Virgile et qui, malgré l'Enéide, a conservé
le premier rang! » (Id. ib.)
Les poètes lyriques anciens ont excellé dans tous les
genres : nous nous bornerons à citer Simonide, dont les
hommes de goût admirent les fragments, et surtout l'ode si
pathétique sur Danaè ; Érinne de Lesbos, dont la belle ode k
Rome a été si heureusement traduite par un membre de cette
académie , l'élégant traducteur de Theocritc ; Sapho , qui a
inspiré Ovide , et dont la gloire a retenti dans toute l'anti-
quité ; il n'est personne qui ne connaisse son ode passionnée,
traduite par Catulle et par Boileau ; Horace a dit de ses
poésies :
Le feu do son amour brûle encor dans ses vers.
Il faudrait nommer aussi Stésichore, Bacchylides, Alcée (c),
bizarre de mots tout défigurés cloit la langue des Dieux, du moins il estbien
sur que ce n'est pas celle des hommes ». (Digression sur les anciens et les
modernes").
(c) « On conçoit une grande idée de tous , par l'éloge qu'en fait souvent
Horace. » (P. Daru).