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                    SOCIÉTÉ DES AMIS-DES-ARTS.




EXPOSITION LYONNAISE DE J860,


    Les premiers qui pénétrèrent dans la salle de l'exposition, le
jour où elle s'ouvrit, ne le firent qu'avec une sorte d'effroi; un
 frisson involontaire parcourut leurs membres de la tête aux pieds
 et leurs pas hésitèrent. Ils se trouvaient à l'entrée d'une forêt de
 tableaux; et quels dangers on court dans les forêts! Ils mirent
 une espèce de courage à pénétrer en avant ; mais plus tard, ils
 ont eu grand tort de s'en vanter; car cet acte de valeur a été
récompense au-delà des efforts qu'il avait coûtés.
    A Paris et surtout en province, chacun est élevé dans la ter-
reur des expositions trop nombreuses, et cette terreur profite
aux artistes autant qu'au public; elle apprend aux uns et aux
autres à dédaigner ce qui n'est pas sérieux, à avoir conscience
du travail et de l'étude nécessaires au talent même le plus facile
et le plus prompt. En outre, elle éloigne la faveur de ces ébau-
ches dont les auteurs prennent un salon pour la devanture d'un
magasin d'imagerie, comptant sur la curiosité du vulgaire pour
conquérir à bon marché le titre d'artistes et les honneurs qui y
sont attachés. Nous-même nous avons vécu sous l'impression de
cette terreur salutaire. Plus nous allions, et plus nous voyions
les pages des livrets se multiplier en sens inverse du chiffre des
œuvres passables, nous ne disons pas de mérite. Vainement on
nous objectait cette raison captieuse, et peut-être péremptoire ,
que les expositions nombreuses sont une preuve manifeste de la
propagation rapide de la passion et même du goût des arts.
Vainement on nous énumérail les sympathies éveillées de plus
en plus par la noble profession d'artiste, les noms distingués,
illustres même, qui,, abjurant certains préjugés de famille,
dont la sottise égalait la haute antiquité, prenaient hardiment en
main le pinceau et l'ébauchoir, au risque de se voir déshérités
par leurs familles en courroux ; il y avait malheureusement
trop de médiocrités désespérantes à toutes les expositions nou-
velles , et même pis que cela, pour ne pas fermer obstinément
l'oreille aux témoignages de satisfaction que leurs promoteurs et
leurs organisateurs se décernaient à eux-mêmes, faute d'en rece-
voir d'autres que ceux du public qui va le dimanche contempler