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64 NOTICE SUR LE TERRITOIRE contre les partisans de la continuité du cours du Rhône, dans le même lit, est tirée d'anneaux de fer, scellés dans des pierres de taille, et qui ont été découverts le long des balmes Viennoises. Voici l'explication très-rationnelle que donne de ce fait M. Fournet, professeur de géologie à la Faculté des sciences de Lyon, et que je retrouve parmi les notes recueillies dans ses intéressantes leçons: le diluvium, quia formulé le relief actuel des balmes et du sol sous-adjacent, en entamant des buttes caillouteuses mal agré- gées , a déposé, en regard de chaque échancrure, des dépôts constituant de véritables barrages transversaux , que le Rhône eut emporté nécessairement, pour se frayer un passage. Or, ces barrages existent toujours, et l'on rencontre souvent, entre les digues qu'ils ont élevées, des marais formés par le défaut d'écou- lement des sources et des eaux de pluies. Les propriétaires de ces marais les peuplent de poissons, y font la pêche, et récoltent les innombrables roseaux qui croissent dans leurs eaux. On est sou- vent obligé d'employer, pour cette exploitation, des barques que l'on amarre au rivage, par des anneaux scellés dans des pierres de taille. Quelques-uns de ces marais ont pu se dessécher, par mille causes; les boucles d'attache ont été retrouvées, et de là l'opinion que les anneaux ont servi à fixer les bateaux naviguant sur le fleuve, dont le courant longeait les balmes en question. Si le fait des anneaux devait être interprété en faveur du pas- sage du Rhône, il indiquerait que les populations de ces contrées étaient déjà très-avancées en civilisation, puisqu'elles savaient travailler les métaux, et qu'elles s'en servaient pour des usages fort vulgaires ; ce qui prouverait que le fer n'était plus une ma- tière précieuse, et que par conséquent l'industrie avait atteint un grand développement. Les anneaux ont donc été fixés à une épo- que que l'on peut, sans crainte de se tromper, qualifier de très- historique. Au commencement du premier siècle de notre ère, le Rhône occupait son lit d'aujourd'hui, et je prouve cette assertion par les vers que Sénèque le philosophe met dans la bouche de Claude, qui, on le sait, était né à Lyon : Vidi duobus imminens fluviis jugum, Quod Phcebus ortv. semper obverso videt,