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                          LE PÈRE DE LA CHA1ZE.                                503

 l'avaient introduit dans toutes les écoles théologiques, et les
 Jésuites en firent si peu une doctrine propre à leur Ordre, que
 plusieurs d'entre eux, tels que les PP, Rebello, Comitolo, Blanchi,
 Bellarmin, Molina, Thyrse Gonzalez, etc., la combattirent dans
 leurs ouvrages.
    Qu'y a-t-il donc au fond de ce mot dont Pascal a exploité le
 sens si peu connu avec une si maligne habileté? Qu'entendent les
 théologiens catholiques par ce mot de probabilisme ? Le droit
 qu'a l'esprit humain de choisir entre deux opinions qui ne sont
 condamnées ni par l'Éeriture-Sainte, ni par la tradition, ni par
les Conciles, ni par les Papes, ni par les Evèques, ni par le bon
 sens, ni par le sens moral. S'il existe en morale des faits certains,
fondamentaux , clairement définis , desquels il est impossible de
 se départir sans violer les lois divines ou humaines, il en est d'au-
tres qui, ne se trouvant écrits ni dans la loi évangélique, ni dans
les codes, ni parmi les principes de la sagesse, ne peuvent re-
lever directement que du libre-arbitre. Or, c'est entre deux actes
de cette dernière catégorie que la doctrine théologique dont nous
parlons permet de choisir le plus probable comme le moins pro-
bable par cette raison bien simple que les lumières de la certitude
manquent complètement à l'intelligence pour faire un choix
motivé, et que, par conséquent, l'opinion qui Semble la plus
probable peut au fond ne l'être pas. Mais il est bien entendu que
la doctrine commune sur ces matières suppose toujours que
l'adoption de l'une ou l'autre des deux opinions ne saurait blesser
en rien le sens moral. « Le probabilisme, en l'absence d'une loi
morale positive , est le respect des droits et de la liberté de
l'homme (1). »
   Qu'a fait Pascal ? Se fondant sur quelques excès d'auteurs pro -
babilistes, condamnés par le Saint-Siège, il a su généraliser la
question avec un art infini, et il n'a que trop bien réussi à per-
suader à un grand nombre de ses contemporains que ses adver-
saires étaient au fond des corrupteurs et des destructeurs de toute
morale.

  (I) M. l'abbé MaynarJ. Pascal, sa vie et son caractère, l. I e r , p. 433.