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LE PÈRE DE LA CHAIZE. 495 M. Ste-Beuve constate même un accord si parfait ù, celte époque entre le Parlement et les Jansénistes, que, pour avoir accès auprès des Conseillers de la Grand Chambre, le plus sûr moyen était de s'adresser d'abord à MM. de Port-Royal (1). Il y avait donc plus qu'un succès littéraire dans l'apparition d'un tel livre, il y avait un événement d'une portée incalculable. Depuis plus d'un siècle, la Compagnie de Jésus avait été ins- tituée, on le sait, pour lutter contre l'esprit de la Réforme. Peu à peu elle avait pris un accroissement considérable, qui s'ex- plique moins encore par cette tendance naturelle de toutes les corporations civiles et religieuses à s'agrandir, que par les sym- pathies et les besoins de l'époque. Si la prospérité de cet Ordre célèbre n'avait eu sa raison d'être dans le bien qu'elle produisait et de profondes racines dans l'opinion, elle serait sans contredit un des faits les plus inexplicables de l'histoire. Mais ce succès est suffisamment justifié par les services que les Jésuites avaient rendus à l'Eglise et à la société tout entière, soit en défendant contre Luther et Calvin la saine doctrine de la liberté morale et l'autorité spirituelle de Rome, soit en luttant contre le principe destructeur du libre examen en matière religieuse, soit enfin en se vouant avec un zèle et une intelligence qui n'ont jamais été surpassés à l'éducation de la jeunesse. L'influence des Jésuites pendant le XVIe et le XVIIe siècle fut donc aussi naturelle que légitime. La lutte qu'ils avaient soutenue contre les disciples de Luther et de Calvin avait été ardente et passionnée comme toutes les luttes religieuses aux époques de foi. Elle fut décisive ; ils fini- rent par assurer le triomphe du catholicisme et de la suprématie spirituelle des Papes. De là , des haines implacables soulevées contre eux, non seulement dans toutes les sectes protestantes, mais encore parmi les -partisans exagérés des libertés de l'Eglise gallicane. Ces haines n'étaient pas les seules. Par une conséquence na- turelle, les Jésuites qui s'étaient constitués les défenseurs du (1) Idem, p. 563.