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DON JUAN. 43 fade jeu de mots. Mais bientôt maître et valet semblent prendre leur parti de leur étrange convive, et le font assister a une orgie. Catalinon lui demande des nou- velles de l'autre monde, si on y couronne la poésie, s'il y a beaucoup de cabarets et du bon vin. On se rappelle involontairement Aristophane et les burlesques renseigne- ments que, dans l'introduction des Grenouilles, Bacchus de- mande a Hercule sur le séjour des ombres. Catalinon, prié de chanter, énumère dans des couplets fort libres toutes les * victimes de Don Juan, y compris la fille du commandeur, et bien que toute cette licence fasse contraste avec une situa- tion aussi terrible, on ne peut méconnaître tout ce qu'il y a de saisissant a faire ainsi rappeler joyeusement tous les crimes en présence même du châtiment. Enfin, Ja statue demande qu'on se retire, il ne reste en sa présence que Don Juan et Catalinon. DON JUAN. Les portes sont fermées, me voici devant toi. Que me veux-tu, ombre, fantôme ou vision ? Es-tu une âme en peine ? Si tu attends l'accomplissement de quelque devoir pour jouir du repos, parle, j'accomplirai, je le jure, ce que tu auras prescrit. Jouis-tu de la vue de Dieu, ou bien la mort t'a-t-elle saisi en état de péché ? Parle, je ne sais que résoudre. LE COMMANDEUR. Promets-tu de tenir parole en vrai gen- tilhomme ? D. JUAN. Homme d'honneur et gentilhomme, jelatiendrai. LE COMM. Donne-moi la main, n'aie pas peur. D. JUAN. Que dis-tu? moi ! peur ! Tu serais l'enfer même que je te donnerais la main. LE COMM. Sur la foi de cette parole et de cette main, de- main à dix heures je t'attends à souper. Viendras-tu ? D. JUAN. Je croyais que tu allais me demander quelque chose de plus difficile. Demain je serai ton hôte. Où fau- dra-t-il aller?