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!2()2 RÉPONSE AU MÉMOIRE DE M. BOLHLL1ER son cœur est vide, sa conscience nulle et son âme indifférente au bien comme au mal. Puis, soit qu'on consulte l'histoire de la vie des hommes ou qu'on jette ses regards autour de soi, ne trouve-t-on pas l'application de toutes ces remarques? Mézerai trace ainsi le caractère de Charles-le-Mauvais, roi de Navarre : « Il avait, dit-il, toutes les bonnes qualités qu'une mé- « chante âme rend pernicieuses, l'esprit, l'éloquence, l'adresse, « la hardiesse et la libéralité ; mais il était fourbe, perfide, cruel, « vindicatif, ce qui lui a mérité le surnom de Mauvais, sous lequel « il est connu dans l'histoire. » C'est dire que l'âme de Charles- le-Mauvais , bien qu'ayant à son service les qualités de l'esprit, était impuissante contre ses mauvais instincts, consequemment lâche et condamnable. On ne parlerait pas de la sorte, si la vie du corps et les pen- chants, si la vie du cerveau et les passions étaient intimement liés avec l'âme de manière à ne faire qu'un seul principe qui ne serait ni le vice , ni la vertu, et qui enchaînerait si étroitement notre existence, qu'il n'y aurait rien de mieux à faire que de vivre selon la nature, comme les bêtes, et de ne s'élever au-dessus d'elles que pour la satisfaction plus raffinée des appétits de notre corps, et en mettant moins de retenue qu'elles dans nos penchants et nos passions. Penser ainsi, c'est tomber dans le matérialisme et donner raison à Epicure, qui veut qu'on ne vive que dans les jouissances matérielles, et qu'on mette à contribu- tion les facultés de l'esprit, pour y ajouter encore, ne voyant rien au-delà du tombeau. Non, non, cette vie matérielle à laquelle on tend de plus en plus, de nos jours, n'est pas celle de l'homme, selon la dignité et la justice dont le souffle divin l'a pénétré. Je le dis, parce que je le sens et que je serais malheureux de ne pas le sentir. Laissons donc de côté les subtilités de l'esprit pour écouter le sentiment général, celui du cœur, de la conscience, c'est-à -dire, de l'âme qui est le sens commun, et nous arriverons à supporter plus courageusement la vie terrestre, et à nous montrer plus dignes de nos semblables et de Dieu. L'âme avant, l'esprit après. La puissance de celui-ci est bien