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SUR L'UNITÉ DE L'AME PENSANTE. 263 inférieure à la puissance de celle-là ; qu'est-ce qui entraîne les multitudes, qu'est-ce qui touche le cœui", élève la pensée, est-ce l'esprit ou l'âme? L'esprit avec ses sophismes ou ses accents passionnés, nous fixe, nous étonne, nous trouble et nous jette souvent dans l'inquiétude, le vague, le doute etle découragement. L'âme, au contraire, avec son influence en quelque sorte divine, nous électrise, nous détache de la terre, nous donne la dignité, la justice, en nous donnant le sentiment et la connaissance de Dieu ; puis, elle nous pare de vertus qui nous relèvent à nos pro- pres yeux et font naître en nous un sentiment de noble orgueil qui se traduit par une profonde humilité devant le créateur et notre faiblesse. Jésus-Christ, l'envoyé de Dieu sur la terre, tout âme bien qu'ayant un corps, d'où est sortie sa puissance, qui a changé la face du monde et qui se soutient depuis dix-huit siècles? De son âme seulement, qui parlait aux âmes et non aux esprits, et c'est toujours par les âmes que l'onction et l'autorité de ses maxi- mes se sont perpétuées. Si quelque chose a pu ternir l'éclat du Christianisme à travers les siècles, ce sont les orgueilleuses spéculations de l'esprit, ce sont les controverses de eeux-mêmes qui étaient chargés de la conservation de l'Arche-Sainte. Puis, les intérêts terrestres, autant que l'esprit d'autorité et de domi- nation, dont nous nous défendons si difficilement, ont mis de plus en plus le Christianisme sous le gouvernement des hommes e t , sans altérer sa morale qui est inaltérable, en ont rendu l'onction moins douce sur les âmes. Sans m'étendre plus loin sur ce sujet, je me bornerai, pour mieux faire sentir la portée de ma pensée, à fixer l'attention sur ce qui se passe en fait de religion et d'éducation. Ce ne sont pas les dissertations théologiques, quelque savantes et spécieuses quelles soient, qui font les prêtres qui ont le plus de puissance sur les âmes, et qui accomplissent le mieux leur mission évangélique. Le pasteur n'agit bien que par l'onction de son cœur, c'est-à -dire, de son âme. Saint Vincent-de-Paul n'élec- trisc-t-il pas plus les cœurs avec sa bonté d'âme excessive et son inépuisable charité, que Bossuet avec les richesses de son